La semaine dernière le
papier de Luc Ferry « No Sport » dans le Figaro m’a fait bondir. Je
n’aime pas que l’on fasse une différence entre culture et sport. L’un et
l’autre ont leurs vertus et rien n’est plus beau que d’apprécier l’art et la
culture en faisant du sport. Pour être vachard, je dirai que Luc Ferry aurait
été un meilleur Ministre de l’Education de la République s’il avait
pratiqué le sport un jour dans sa vie de potache….
Mais depuis le match
Grenoble-Brive et encore hier soir, lors du match de ProD2 Agen-Biarritz, les
joueurs de rugby lui donnent des raisons de confirmer ses propos. Les équipes
professionnelles de rugby sont en pleine effervescence, la
« pression » est telle que les cocottes vont exploser.
J’ai l’impression que le
rugby français marche sur la tête. Les équipes se présentent à 23 mais jouent
leur match parfois à 13 contre 15. La « générale » de Grenoble-Brive,
va faire peur aux sponsors, aux médias et bien plus encore aux mamans dont les
garçons voudront découvrir le rugby. Il semble que nous ayons reculé de 10 ans
en ces périodes électorales.
Les candidats
s’affrontent par petites phrases à la FFR comme à la LNR. Les programmes des
uns et des autres ne sont pas connus globalement, les réunions ont lieu entre
gens du rugby. Paul Goze sort un plan stratégique 2016-2023 alors que des
élections se profilent et qu’il n’est pas sûr d’obtenir un mandat …à moins que
les jeux soient déjà faits ! D’autres sportifs regardent le rugby, payent
des abonnements à la télévision et vont au stade pour voir du sport et parfois
du spectacle. Le rugby n’est pas souvent au rendez-vous ce derniers temps. Y
a-t-il un pilote pour diriger ce sport ?
Il a fallu attendre les
phases finales du Top 14 de la saison dernière pour voir un peu de jeu et avoir
quelques émotions… Cette année recommence et nous avons vu quelques beaux
matches grâce à La Rochelle et Clermont. Mais pour le reste qu’avons-nous vu,
des bagarres, des cartons jaunes et rouges en augmentation sensibles, des
arbitres qui ne sont pas aidés par leurs assistants et font des erreurs, des
présidents qui perdent patience, des dirigeants qui règlent leurs comptes par
médias interposés et des terrains qui sont indignes de recevoir un match de
niveau national… et des mêlées qui s’effondrent, des joueurs chevronnés qui
perdent des ballons.
Je comprends que la
préparation ne soit pas au même niveau pour les équipes éliminées en Avril
dernier et celles qui ont joué la finale. Mais je ne comprends pas que l’on
puisse jouer un jour de championnat alors que les clubs ont des internationaux
mobilisés par l’équipe nationale. L’image de la France en est salie même si
cela fait du business. Nous perdons en Europe par manque de cohésion, de projet
de jeu, de préparation et le championnat est dévalué. Personnellement cela
m’empêche d’aller au stade et je regarde les matches de Super Rugby. J’y vais
même 4 mois en voyage pour tenter de comprendre pourquoi les All Blacks gagnent
pratiquement tous leurs matches. Je vous donnerai mon idée dans quelques temps…
Je comprends l’urgence de
gagner des matches à tout moment mais je ne comprends pas que les équipes ne
bâtissent pas une stratégie de jeu en fonction de l’inspiration de l’esprit du
rugby : affrontement, combat, possession du ballon, contournement des
défenses, jeu d’évitement et jeu dans les intervalles. On en est à bagarre et
affrontement brutal comme aux autos tamponneuses. Quand je veux voir cela, je
vais à la fête foraine, mais une seule fois.
L’évolution des premières
lignes depuis une dizaine d’années, semblait annoncer des joueurs des
silhouettes un peu plus athlétiques mais de nouveau on trouve des cubes. Mais
surtout les piliers des mêlées s’écroulent et c’est très pénible pour le
spectateur ou le téléspectateur. On passe notre temps à regarder des mises en
place surveillées par des arbitres qui ne comprennent rien au petit jeu des
premières lignes. La mêlée est devenue la plaie de notre rugby. Même les
Argentins inventeurs de la « bajarita » ont évolué pour trouver des
solutions et commencé à exister dans le Rugby Championship et le Super Rugby.
Si je me rappelle un talonneur international argentin est allé soigner la mêlée
de l’équipe australienne…Dans l’hémisphère sud et chez les anglo-saxons le
problème a nettement évolué. Le jeu est plus clair, le temps de jeu plus long,
les joueurs plus athlétiques. Le jeu et le spectacle de meilleure qualité. Même
les sud-africains tentent d’évoluer vers un jeu plus complet ; les Lions
sont leur vitrine même s’ils ont perdu en finale du Super Rugby.
Pour les mêlées qui
s’effondrent, il faut dire que les terrains n’arrangent pas les choses. Après
chaque mêlée il faudrait faire comme au basket que les jardiniers interviennent
pour remettre en état la pelouse…Le terrain d’Oyonnax n’a plus ce défaut.
La LNR par son président
sortant a donné quelques réflexions au futur président de la FFR sur le rugby
professionnel de demain avec son plan stratégique. Souhaitons que la
« République des copains » se penche sur les sujets du développement
du rugby en tenant compte de ce qui se passe dans le monde. Ne pas regarder que
le nombril de la France. Rugby World, parle d’un championnat du monde des
clubs… M. Boudjellal voulait organiser une rencontre entre le vainqueur du
Super 15 et le Champion d’Europe. Refusé par les instances, mais on lui a piqué
l’idée…Pas bien d’avoir raison trop tôt à ce jeu non plus.
La stratégie des
Présidents de clubs, de plus souvent des chefs d’entreprise, est de mener les
équipes sur le long terme. Contrairement à ce que pense Luc Ferry, le sport est
un des vecteurs de lien social les plus puissants d’un pays. Comme les clubs
sont menés comme des entreprises, ils sont soumis aux lois de
l’entreprise : un environnement, une organisation de production et
commerciale, des équipes et des hommes. Quand un de ces éléments varie tout le
système varie. Quand M.Goze parle, M. Boudjellal s’irrite, M. Ibanez règle ses
comptes tout le système Rugby se modifie… Les joueurs sont forcément sous
pression et ils en perdent leurs moyens. Ce qui montre une grande lacune de
formation technique et mentale. L’éducation au rugby est encore trop faible.
Pour ma part je pense qu’elle intervient trop tôt pour nos jeunes joueurs et
qu’elle est trop ciblée rugby. La formation rugby devrait être couplée au début
avec basket et handball pour le jeu de main, un peu de foot pour le jeu de pied
(c’est football-rugby à l’origine) et golf pour la préparation mentale.
Enfin je vais terminer
par ce qui m’a époustouflé depuis deux ans, le rugby à 7. Un rugby d’athlètes
un autre sport que le rugby certes mais à la lecture et au spectacle
remarquable. Son inscription aux Jeux Olympiques a fait bouger les lignes. Les
pays qui l’ont snobé ont été punis, comme en golf. Mais Terry Bouhraoua et
Julien Candelon feront des émules, j’en suis persuadé. L’idée d’un championnat
itinérant est en chemin aussi bien pour les filles que pour les garçons et je
pense dès aujourd’hui que c’est porteur d’espoir pour l’avenir de ce nouveau
sport. Il pourrait plaire à beaucoup de jeunes gens.
J’espère que les futurs
dirigeants du XV, vont prendre les bonnes décisions et rapidement, pour
endiguer le déclin. Nous sommes à la
dérive comme le reste du pays… Je le regrette vivement, nous nous trompons de
plus en plus souvent dans nos choix.
Michel
Prieu
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire