Bonjour,
Samedi
matin, je suis allé chercher « Quinze bleus de légende » le dernier
supplément du Journal l’Equipe. J’étais un peu perdu au milieu des journaux et
j’ai eu besoin d’aide. La dame brune qui m’a aidé dans un bel accent de
Marseille me dit : « je ne connais rien au Rugby mais depuis que nous
sommes ici mon mari va voir des matches et se régale ». Sans sourciller je
lui dis tout de go que je trouve cela normal. Le rugby a une philosophie qui
n’existe pas au foot…
En
fait, le début d’année a été très perturbé du fin fond du Maroc aux Alpes en se
noyant à Los Alcazares*** près de Murcia en Espagne. Faire un peu d’histoire sur
le rugby me paraissait un bon plan. Je venais de récupérer mon dernier achat
sur le sujet qui va m’occuper durant l’été prochain, notre nouveau voyage en
Nouvelle Zélande. Ce pays nous a marqué l’an dernier. Je sens qu’il a encore
des choses à nous dire et le mieux est de les vivre sur place. Françoise est
déjà sur les recherches pour passer les trois mois autorisés sur le sol des All
Blacks. J’hésite toujours à parler des « kiwis » quand je fais
référence aux habitants Néo-Zélandais.
Les
journalistes du supplément hors-série de l’Equipe ont concocté une équipe
légendaire. Leur sélection fait appel à l’histoire de ce sport. Les choix que
les journalistes ont fait sont plutôt judicieux à mon goût. Les joueurs qu’ils
ont choisis sont des hommes qui ont par leur parcours et ce qu’ils ont apporté
au jeu des héros à mes yeux. Des hommes dont le destin était de faire changer
le cours des choses, d’en révéler les forces et les faiblesses. Mais en plus
chacun présente des qualités qui font la richesse et la philosophie de ce jeu.
Car au début c’est un jeu, ne dit-on pas jouer au rugby ?
C’était
vrai à l’origine sans doute plus que maintenant que le professionnalisme a fait
son apparition en 1995. Loin d’être un sport national le rugby inventé par les
britanniques est un sport de clocher dans le sud de la France. Dans mon village
du pied des Pyrénées nous y jouions tous les jours, à l’école comme dans la
rue. Le ballon ovale n’était qu’une vague chaussette de laine bourrée de tissu.
Mais nous rêvions des exploits de ce que nous allions voir au Stade Jules Soulé
en resquillant soit par-dessus le mur d’enceinte soit par l’entrée des joueurs.
Déjà ça, c’était du sport pour contourner la surveillance du gardien du stade.
L’odeur de l’huile camphrée était un stimulant pour tous les gamins qui étaient
là. Un ballon qui traînait servait aussitôt à faire des passes. Le soir même
après la sortie du Stado tout était bon pour refaire une partie comme nous
l’avions vue.
A
l’école communale, il y avait des instituteurs qui aimaient le rugby et si un
élève n’appréciait pas le jeu proposé dans la cour ou sur le pré adjacent en
fin de journée, son carnet de notes pouvait en pâtir. Le rugby des champs
rythmait notre vie d’enfants, mais les autres sports aussi selon la saison.
En
grandissant au Collège ou au Lycée les choix s’opéraient. Entrer dans l’équipe
du rugby à huit de son école était un honneur. La sélection venait des
professeurs de gymnastique qui devaient préparer leurs équipes pour les
championnats scolaires. La rivalité entre les différents lycées des villes des
environs n’était pas feinte. Les rencontres pouvaient être sévères. Autour de
Tarbes, Lourdes, Lannemezan, Bagnères de Bigorre, Vic Bigorre, Auch même, les
rencontres étaient acharnées. Les premières émotions autour de ce jeu venaient
de ces confrontations scolaires. Ce sont ces premières parties qui nous ont
fait comprendre des valeurs essentielles de la vie, le plaisir de jouer avec
les copains, l’abnégation, la solidarité, le respect des règles, l’honneur de
représenter un maillot.
J’ai
grandi dans cette connivence avec le sport pour arriver vers l’âge de 16 ans à
jouer dans ma première équipe civile à Toulouse. Nous ne venions pas au rugby
si tôt. Les écoles de rugby n’existaient pas encore. Le football, le basket ou
le handball étaient déjà mieux structurés pour accueillir les jeunes fils
d’ouvriers que nous étions. Pour jouer dans les cadets du Stado, il fallait
être initié ou avoir été repéré par des professeurs sur les terrains scolaires.
Ce n’était pas mon cas même si je n’étais pas manchot. Le dimanche, mon plaisir
était de jouer au foot avec mes copains et pour mon village. Je faisais comme
mes oncles qui jouaient en équipe première.
Vu
de loin à la télévision les mamans sont affolées par la brutalité apparente de
ce sport et redoutent les blessures pour leurs rejetons. Mais l’approche du jeu
et l’entraînement préparent à cela. Il y a une technique pour tout, c’est le
but de l’éducation au jeu. Ce sport est éducatif et de nos jours filles et
garçons y jouent. Le symbole de ce jeu c’est l’offrande de la passe et la vie
du ballon.
Au
rugby, il y a de la place pour tous les gabarits. Les mensurations du joueur
n’ont pas vraiment d’importance, même si des postes sont spécifiques. Chaque
joueur aura besoin de développer ses qualités gestuelles. Le ballon ovale est
capricieux par nature et le manier s’apprend par des jeux et des exercices. La
technique de plaquage n’est pas obligatoire avant 10 ou 12 ans pour prendre le
plaisir à jouer. Le jeu éducatif se fait à « toucher » et cela peut
durer longtemps pour s’entraîner ou simplement courir et prendre du plaisir
entre amis, sur un terrain dur, un pré ou la plage.
Pendant
longtemps sport amateur, ce discipline a pu être un ascenseur social au plan local
et national pour les plus doués des joueurs. Même professionnel c’est encore le
cas.
Le
rugby développe des qualités physiques, révèles des valeurs psychologiques et
mentales et les valeurs de la vie individuelles et collectives. L’osmose d’une
équipe est souvent comparée à celle d’une famille. A sa place dans une équipe
un joueur apprendra l’organisation pour se situer sur le terrain, à son poste
et le respect des règles. En même temps respect de ses partenaires et du
Monsieur important du jeu : l’arbitre. Un joueur de rugby ne discute pas
les décisions de l’arbitre. Il laisse ce soin cela pour la fin du match ou aux
spectateurs.
Le
rugby va développer le goût du travail pour s’améliorer et tirer le meilleur de
soi pour aider les autres : vitesse, agilité, adresse, feinter, éviter
pour laisser vivre le ballon et le partager avec ceux de son équipe. La
dextérité, la ruse, l'ingéniosité, l'à-propos, l'instantanéité de la prise de décision suivant les postes, la force, la détente selon d'autres, la
puissance seront des atouts naturels.
L’élégance,
la pugnacité, le courage, la solidarité, le don de soi, l’abnégation, la
fierté, la confiance en soi, sont des valeurs qui s’exaltent dans une équipe de
rugby et font grandir l’individu pour rejaillir dans le jeu de l'équipe. Sport de contact,
parfois rude, le jeu reste loyal et la droiture, le respect de son partenaire
pour le protéger ne sont pas de vains mots. L’élégance comme la malice, les
qualités de meneur d’homme sont des attitudes qui aident les joueurs à se
singulariser au poste où ils se trouvent.
Au
plan de l’équipe le rugby va développer des sentiments d’amitié individuelle et
collective, l’amour d’un maillot et des couleurs d’un village, d’une ville ou
de la Nation pour les plus forts. Porter le maillot de son pays ne se galvaude pas, c'est un honneur, le rêve de beaucoup d'enfants. Dans une équipe il faut un leader, un meneur
de jeu, le rugby à besoin d'une épine dorsale; d'une communication, d'une connivence qui soude les joueurs. C’est avec le temps que se trouvent ces valeurs chez
les joueurs.
Le rugby est aussi une passion qui se découvre. Si l’on n’y goûte pas sur le bord d’un terrain ou en jouant avec les copains, pas facile d’en comprendre les subtilités. C’est toute une éducation. Une fois mis dans le bain de cette philosophie, il vous marque à vie. Vous entrez dans une confrérie spéciale qui fait que, où que vous vous trouviez les rapports entre joueurs seront plus fraternels.
Le rugby est aussi une passion qui se découvre. Si l’on n’y goûte pas sur le bord d’un terrain ou en jouant avec les copains, pas facile d’en comprendre les subtilités. C’est toute une éducation. Une fois mis dans le bain de cette philosophie, il vous marque à vie. Vous entrez dans une confrérie spéciale qui fait que, où que vous vous trouviez les rapports entre joueurs seront plus fraternels.
Les
All Blacks, meilleurs joueurs du monde depuis le début du jeu en 1870, ont encore élevé
l’approche du rugby et sont un exemple universel. Ce sport fait partie de leur Histoire profonde, il est leur identité. Le rugby a
pris les qualités de guerrier du peuple maori pour créer avec les colons blancs
une nation cohérente et reconnue dans le monde entier. Le maillot noir et la fougère argentée en sont la représentation connu de tout le monde. Toutes les valeurs
évoquées plus haut sont présentes dans cette symbiose. Elle est un honneur élevé et donne de nombreux devoirs, entre autre celui d'être irréprochable dans son attitude et améliorer la valeur du maillot que chacun des élus reçu.
Leur force est d’avoir créé une culture forte autour du respect de l’Histoire du pays et de ses peuples, le respect du travail des anciens, les valeurs spirituelles qui conduisent la vie de chacun. Pour les éducateurs néozélandais, le rugby est une culture qui dépasse et transcende la stratégie. Leur humilité, leur lucidité sont des caractères fondamentaux du jeu et des hommes qui le pratiquent. Le haka néozélandais n’est pas une danse tribale, c’est le symbole de leur attachement aux valeurs des anciens. Ils vont chercher avant de jouer, leur ardeur à jouer au meilleur d’eux-mêmes pour les autres. Ils se transcendent ainsi pour créer une unité. Leur spiritualité est un facteur d’intégration qui se ressent dans la rue lorsque l’on connait ce pays. La Nouvelle Zélande est pays magnifique où il fait bon vivre…Comme dans une équipe de rugby !
Leur force est d’avoir créé une culture forte autour du respect de l’Histoire du pays et de ses peuples, le respect du travail des anciens, les valeurs spirituelles qui conduisent la vie de chacun. Pour les éducateurs néozélandais, le rugby est une culture qui dépasse et transcende la stratégie. Leur humilité, leur lucidité sont des caractères fondamentaux du jeu et des hommes qui le pratiquent. Le haka néozélandais n’est pas une danse tribale, c’est le symbole de leur attachement aux valeurs des anciens. Ils vont chercher avant de jouer, leur ardeur à jouer au meilleur d’eux-mêmes pour les autres. Ils se transcendent ainsi pour créer une unité. Leur spiritualité est un facteur d’intégration qui se ressent dans la rue lorsque l’on connait ce pays. La Nouvelle Zélande est pays magnifique où il fait bon vivre…Comme dans une équipe de rugby !
« L’esprit du rugby
encourage les plus faibles à redoubler d’effort, il réfrène l’égoïste et impose
la discipline à tous. Il traite chaque homme en tant qu’égal d’où qu’il vienne.
Le standing ne compte plus rien dans le plaquage et sous la mêlée il n’y a pas
de privilège. » Sir Richard Wild6 Président de la Cour Suprême de Nouvelle
Zélande en 1967.
Avec
toutes nos petites affaires politiciennes, on ferait bien de se bâtir un projet de
société qui ressemble à une philosophie proche de cette sage sentence…
Demain sera un autre jour et on peut l’espérer meilleur...
Michel Prieu
***Pour les inondations voir: surprisesdevoyage.blogspot.com
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